Nouvelle mission! Composé pour une pub.{pv Moriko Ono

C’est tôt. Beaucoup trop tôt.
Peu importe comment elle y pense, Moriko ne se sent pas prête. Ce n’est qu’une première année, elle ne connait même pas encore le bâtiment par cœur. Elle a à peine commencée les cours. Enfin. C’est le premier mois, quoi. Aucune habitude n’a été prise et elle s’inquiète pour tout.

Rien que ce matin, une fille de sa classe est venue lui parler, et elle a eu du mal à répondre. Pendant plusieurs secondes, elle est restée là, figée, les yeux énormes. Quoi? Elle lui parle? À elle? Mais pourquoi? Oh non. Elle attend une réponse. Euh. Qu’est-ce qu’elle disait déjà?
Et la voilà, toute rouge, s’excusant, lui demandant de se répéter, alors que sa camarade n’avait lancée qu’un simple « ça va ? ».

Des fois Moriko avait un peu honte d’elle-même. Tout est trop compliqué, et elle ne comprend même pas pourquoi. Parler aux autres ne devrait pas être difficile. Il n’y a même pas de barrière de langue. Alors le problème doit venir d’elle, forcément. Et elle réfléchis. Trop longtemps. Qu’est-ce qui la fait devenir ce qu’elle est aujourd’hui? Est-ce qu’il y a eu un événement pour tout changer? As-t-elle toujours eu tant de mal à aller vers les autres ou y a-t-il eu une époque maintenant oubliée où elle pouvait rire et parler sans se soucier de quoi que ce soit, sans que sa voix ne tremble, et que ses joues ne commencent à chauffer.

Et voilà qu’on lui donne un travail beaucoup trop grand pour elle. Ça y est, elle se sent déjà minuscule, sous la contrainte. Composer la musique d’une pub. Rien que ça. Et d'une marque connue, en plus. Ses mains tremblent et froissent un peu le dépliant au passage.

On l’a associée à une certaine Miho Asane, une troisième année. Au moins elle n’était pas toute seule pour ce job. Évidemment qu’ils n’allaient pas donner un tel travail à une première année sans expérience, ah!

Au point où elle en est, elle espère juste ne pas être un poids pour son aînée. Mais peut être paraîtra-t-elle gourde? Peut être qu’au moment venu, elle oubliera tout ce qu’elle a apprit et ne sera plus capable de rien.

Ok, on se calme, on respire. Comme ça c’est bien. Moriko qui marche lentement dans les couloirs, le cœur battant. À croire qu’elle se rend où lui hottera la vie. Il n’y a pas de guillotine dans cette école, n’est-ce pas? Inspire, expire, et calme toi, sérieux. C’est pas possible de stresser comme ça sur presque rien. La jupe de son uniforme en prend toujours pour son grade à être tirée et chiffonnée dans tous les sens.

Finalement elle arrive devant la porte de la salle, et sans s’être perdue! La main sur la poignée de la porte, et elle se bloque encore une dernière fois. Ce n’est qu’un devoir. Un peu plus qu’un simple devoir. Mais un devoir quand même. Ça va aller. La porte s’ouvre.

Il y a une fille, seule, dans un coin de la salle. Ses cheveux sont clairs. Est-ce qu’elle s’est fait une couleur? Oh, et long aussi. Penser à tout et n’importe quoi pour oublier qu’on ne se sent pas à l’aise. Pourquoi est-ce qu’elle est seule, il ne devrait pas y avoir d’autres gens? Rah, peu importe! Moriko s’avance. Arrivée à sa table, elle se mord la lèvre, fronce un instant les sourcils, puis relâche le tout avant de se lancer.

▬ Hum… Miho Asane? Je… On est ensemble sur un projet? Moi c’est Moriko… Moriko Ono.

Et avec ça, l’envie de se pendre.
Comment faisait-elle pour rater une phrase de présentation? Ce doit être un talent, ça, non? Est-ce qu'elle a le droit de gagner le prix de la plus nulle en communication de toute l’école avec ça?

Heureusement qu’elle ne voulait pas devenir idole.

La troisième année la regarde droit dans les yeux et lui sourit. Moriko se mord les lèvres, embarrassée. Elle est impressionnante avec ses cheveux si clairs. La couleur est un peu bizarre, plus foncé que du blond, mais pas vraiment du roux. Elle plisse les yeux de satisfaction en parlant du projet. En voilà au moins une qui a l’air motivée!

Puis elle semble se ressaisir. Moriko décide que c’est le bon moment pour s’assoir près d’elle. Elle pose son sac par terre, près des pieds de sa chaise, et entend la voix encore nouvelle à ses oreilles lui demander son avis pour le devoir.

Un classeur plein de feuilles quadrillés et d’autres de partitions est sorti du sac et posé sur la table. Moriko s’humidifie les lèvres encore une fois. Se penche à nouveau pour sortir sa trousse avec un motif enfantin de robots colorés. Déjà une question difficile à surmonter.

▬ Quelque chose… D’élégant? Assez simple, mais qui reste en tête bien sur…

Elle n’avait aucune idée de si sa réponse convenait. Qu’est-ce qu’un son élégant, d’abord? Elle peut s’en faire un exemple à résonner dans sa tête, mais l’expliquer avec des mots est déjà beaucoup plus dur. Et puis il fallait voir quels instruments utiliser. C’était peut être la première chose à faire, en fait?

Moriko regarde autour d’elle. La salle de composition avait tout le matériel utile pour ce genre de travail. Elles se sont retrouvées ici pour une raison après tout. Mais commencer de rien… Et travailler à deux… C’est difficile à visualiser. Ça ce trouve, elles ne seront d’accord sur rien. Que faire dans un tel cas? Accepter les idées de l’ainée parce qu’elle est plus expérimentée? S’en aller et lui laisser le travail? Non, ce serait mal vu.

Les cheveux noirs de Moriko lui cachent le visage, comme un rideau, quand elle baisse la tête. Fixer ses mains ne l’aide jamais vraiment mas ça lui donne l’illusion d’être à peu près calme. D’être là. D’être elle. Qu’il s’agit d’une réalité et non pas d’un rêve. Quelque chose qu’elle va réussir à surmonter, puisque tous les moments, bons comme mauvais, passent de la même façon.

Une mèche placée derrière l’oreille, les points serrés, elle se tourne vers Asane.

▬ Peut être un peu lent au début? Puis on accélère et ajoute des notes joyeuses? Comme…

Elle réfléchit une seconde. L’idée prend forme, peu à peu. Mais elle n’est pas sure d’elle, comme toujours. Même en se répétant « tu peux y arriver » elle n’est pas sure de se faire confiance. À trop se mordre ses lèvres se retrouvent blessées et n’ont pas même le temps de guérir. Ça les rougit parfois. De loin on pourrait croire qu’elle porte du rouge à lèvre.

Moriko commence à chantonner. Puisque les mots ne l’aident pas à transmettre correctement ses idées, à la place elle laisse la musique faire le travail. Ce ne sont que des « hm-mmh » et elle doit s’y reprendre plusieurs fois pour vraiment présenter ce qu’elle avait en tête, mais arrive finalement à un résultat plutôt satisfaisant.

La tête penchée, les mains liées, elle attend d’entendre ce qu’Asane en pense.

Même si son ainée rejette l’idée, elle ne le prendra pas mal. Elle n’a fait que répondre à la question après tout. Puis ça fait toujours une première musique sur laquelle elles peuvent se baser pour faire autre chose.