Sasuke NAKAMURA

Si tu savais... mais, sérieux, si tu savais comme je suis relou ! Non mais vraiment, honnêtement, je ne sais même pas comment font les gens pour tenir une conversation avec moi plus de cinq minutes. Je suis pas sympa t'sais : j'ai un égo plus fat que le postérieur de Nicky Minaj, et j'ai la sociabilité d'une huître qui ne se laisse pas ouvrir à un réveillon de Noël parce qu'elle a envie de faire chier. Je ne me considère pas supérieur aux autres,
je suis supérieur aux autres, c'est pas compliqué pourtant !
Je suis intelligent, riche, et j'ai une voix doublée d'un faciès de beau gosse,
comment veux-tu que je sois modeste ? Bon, en vrai, y a pire que moi, parce que sous mes grands airs de petit merdeux mec pas très sympa,
je ne suis pas foncièrement mauvais. La méchanceté gratuite me débecte,
et même si je peux gentiment te coller mon poing sur la gueule si tu viens me titiller de façon un peu trop prononcée, je fais rarement du mal aux gens.
Pas volontairement du moins. Des fois ma délicatesse verbale fait que... bon,
c'est compliqué, mais il est rare que j'attaque quelqu'un par plaisir.
Quant à mon côté solitaire à tendance associable, je ne l'ai pas acquis à ma naissance non plus, mais vous comprendrez en lisant mon histoire. Disons que je n'aime pas particulièrement les gens mais ils ne me débectent pas non plus. Il me faut juste du temps, et ma confiance est très difficile à gagner. Pourtant une fois que le challenge est relevé, je suis un ami fidèle et plutôt dévoué. Incisif et insupportable, mais dévoué.
En résumé, j'ai un caractère pourri, mais au fond, je suis plutôt sympa... si t'as une pelle pour creuser assez en profondeur.

Vous avez déjà eu l'impression d'être toujours derrière malgré des efforts constants ? L'impression que, quoi que vous fassiez, vous ne serez jamais assez bien. Nulle part. Jamais. Mes parents m'ont toujours fait comprendre que j'étais moins bien que mon frère. Moins intelligent. Mois talentueux. Moins drôle. Je m'en demandais presque pourquoi ils avaient décidé d'avoir un second enfant vu l'incarnation de la perfection qu'ils avaient déjà pondue. J'ai eu beau me battre toute mon enfance pour leur plaire et avoir de la reconnaissance, j'aurais pu pisser dans un violon que ça aurait eu le même effet.
La frustration grandissait et me rongeait de l'intérieur jusqu'à me faire détester ce frère qui me faisait de l'ombre. J'étais talentueux pourtant : les professeurs étaient les premiers à complimenter mon travail, mes compétences à la guitare étaient plus que correctes, tout comme le timbre de ma voix qui séduisait les gens qui prenaient le temps de m'écouter. Mais ça ne suffisait pas. J'avais beau essayer de m'enorgueillir avec les compliments que je recevais, ne pas attirer l'attention de mes parents me rendait parfaitement amer.
Se raccrocher aux branches, c'était mon seul choix. J'imprimais chaque mot qui cherchait à flatter mon égo, et je finis pas me dire qu'il n'y avait bien que mes parents qui ne reconnaissaient pas mon talent. Je devins hautain, je ne le cache pas. Méprisant au point d'être parfois méchant face à mes concurrents dans les concours de chant auxquels je participais. Je me bâtis une sacré réputation grâce à cette période... mais pas forcément dans le bon sens du terme. Je n'ai donc pas trop eu d'amis pendant mon enfance, puisque les gens qui me côtoyaient avaient soit une profonde aversion pour pour caractère, soit peur de moi.

Puis un beau jour, ma vie bascula...
J'avais 15 ans cette année-là. C'était un jour de septembre, deux semaines après la rentrée scolaire. Je rentrais d'une journée de cours ennuyeuse et en passant la porte, la première chose qui m'interpela fut la voix de mère. Elle pleurait. Un sentiment étrange me serra la poitrine : cette femme si stoïque et plus impassible qu'un bloc de marbre ne versait jamais une larme, alors je compris vite que quelque chose de grave s'était produit. La gorge nouée, je m'avançai à petits pas jusqu'au salon. Mon père était assis prêt d'elle, et je pus voir la douleur et les larmes sur son visage aussi. L'annonce qu'il me fit me traversa comme une lame acérée: mon frère avait eu un grave accident de voiture et avait trouvé la mort quelques heures plus tôt. Je sentis ma poitrine se compresser et je courus instinctivement me réfugier dans ma chambre. Aussitôt la porte refermée, je tombai à genoux sur le sol, tremblant et n'arrivant pas à retenir les grosses gouttes d'eau salée qui roulaient sur mes joues. Le garçon que j'enviais depuis toujours et qui m'avait fait de l'ombre depuis si longtemps venait de disparaître de mon chemin. J'aurais dû être satisfait de pouvoir enfin être sur le devant de la scène sans rival pour me voler sans cesse la vedette... pourtant, cette douleur que je ressentais et qui me donnait presque la nausée me faisait comprendre que l'importance de la personne que je venais de perdre était bien plus grande que celle d'être le meilleur aux yeux de mes chers parents. La culpabilité m'avait saisi à la gorge et je ne pus bouger ou penser à autre chose pendant deux bonnes heures.

Les jours qui suivirent furent maussades. L'atmosphère pesante qui régnait à la maison me torturait et je redoutais chaque retour du lycée. Les funérailles furent insupportables tant la douleur qui m'étreignait la poitrine était vive et prenante. Je repris doucement la musique et le chant, mais il me fallut plusieurs mois pour reprendre les concours et les concerts. La vie suivait son cours mais tout avait changé. Mes parents venaient me voir, s'intéressaient à mes résultats, et m'encourageaient. Leur intérêt soudain pour ma personne ne me réjouit pas comme je l'aurais pensé, au contraire, il me rendait furieux. Je leur en voulais d'avoir attendu ce drame pour se tourner vers moi. Je leur en voulais d'oublier si facilement leur fils aîné. Je leur en voulais d'avoir l'impression que leurs paroles sonnaient affreusement faux.

Pourtant, je ne pus me résoudre à abandonner la musique... mais quand je fus majeur, ce fut mes parents que j'abandonnai. Après avoir récupéré l'accès à mes comptes bancaires bien remplis par la famille, et sur lesquels mes parents n'avaient plus aucun droit, je quittai le domicile familial pour continuer mes études loin d'eux. Depuis je ne leur donne plus de nouvelles. Leurs appels et messages restent sans réponse. Peut-être qu'un jour j'arriverai à leur pardonner, à me pardonner, mais pour l'instant, ce n'est pas prêt d'arriver.